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Association pour la Connaissance de la Culture Historique Littéraire & Artistique


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Une visite au musée Toulouse-Lautrec d’Albi

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Vingt ans après, je suis retourné visiter le musée Toulouse-Lautrec, motivé que j’étais par l’annonce qui avait été faite d’une restauration. Car, au siècle dernier, j’avais été frappé par la vétusté de la présentation des chefs-d’œuvre de l’artiste comme du lieu. Mais arrivé au vingt-et-unième siècle je pouvais espérer que ce genre de muséographie avait disparu. Quelle ne fut pas ma déception ! Certes, les touristes estivaux qui affluent en masse sont maintenant mieux accueillis : les toilettes sont plus spacieuses, l’ascenseur plus performant, la billetterie plus pratique, la librairie à la mesure des pulsions d’achat propres aux estivants… mais les œuvres du maître ? Les peintures, dessins et lithographies sont exposés sous verre. Quoi de plus normal me direz-vous pour protéger la collection ? Mais des verres tâchés, marqués d’auréoles. Acceptons toutefois cette présentation s’il s’agit de préserver les œuvres. Le conservateur a le souci de conserver. Ce serait alors sans compter avec l’éclairage des salles d’exposition – une déficience que l’on retrouve dans beaucoup d’autres musées. Ici, au musée d’Albi, ce sont des spots que l’on a dirigés vers les vitres. Les vitres plutôt que les œuvres de Toulouse-Lautrec, car ces lumières crues et jaunes, sans nuances, s’y reflètent directement révélant les marques évoquées plus haut. Jeu des voiles et des lumières au détour duquel, en se frayant un passage, bousculant quelques visiteurs à la recherche du meilleur point de vue – celui qui évite les reflets – on peut espérer voir un fragment de la touche du peintre et sa palette si riche. Voir seulement ! Car les photos sont interdites même sans flash. Quelle ironie !

Quelle tristesse de constater que nos musées utilisent leurs maigres budgets à améliorer leurs commodités aux dépens des œuvres elles-mêmes. Car, même dans les grands musées parisiens, de tels constats se font. On adopte une politique culturelle éminemment touristique et donc médiatique, faite pour attirer en masse le public, quel qu’il soit. Et ça marche grâce à la multiplication des expositions temporaires douteuses sur des thèmes populaires : impressionnisme et postimpressionnisme ou « de Rembrandt à Picasso »,  » de Velázquez à Picasso » « de Picasso à Picasso »… on tourne en rond mais aux dépens des collections permanentes qui sont remisées dans les sous-sols alors que leur valeur est le plus souvent immensément supérieure. Combien de fois au cours de mes voyages j’ai été la victime de cet escamotage, malheureusement devenu banal. Pas plus tard qu’au printemps dernier, au musée des Thermes de Cluny où les premières salles, celles qui devaient présenter, entre autres, des tissus musulmans très anciens et donc très rares, avaient été vidées pour faire place à quelques retables germaniques, souabes, du gothique tardif – très spectaculaires d’ailleurs. Ne peut-on pas apprécier les deux ? Non ! car il faut désormais qu’un musée soit dynamique, « que ça bouge », que ça change constamment. Il faut montrer qu’on existe. Voilà comment on se modernise et tant pis si les éclairages restent archaïques et les peintures sous verre ou recouvertes d’un vernis qui, au fil des siècles, a noirci – fameux débat que celui du vernis historique en France ! Le Louvre est dans ce domaine champion du monde. Faut-il en appeler aux fonds, privés, américains ? C’est la tendance. La culture est démunie faute de moyens. L’Etat a démissionné de ce domaine comme dans bien d’autres… bientôt un hôtel grand luxe à Versailles.

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